Depuis le début des années 1980, il existe en France les Fonds Régionaux d’Art Contemporain (dit FRAC) dont les objectifs principaux sont de collecter, conserver et diffuser localement des œuvres d’art contemporain, toutes pratiques confondues. En créant ainsi une collection nationale, l’État souhaite soutenir les artistes nationaux et internationaux tout en décentralisant l’art de Paris pour l’apporter à tous.


stan douglas flame
© Stan Douglas, Flame.1947, 2010.
Collection FRAC Normandie Rouen

Pour autant, l’objectif de diffusion auprès d’un public étendu n’est pas totalement atteint : des études expliquent que les visiteurs sont ayant un goût pour les structures spécialisées en art contemporain s’intéressent moins aux musées de beaux-arts et qu’à l’inverse, les visiteurs des musées de beaux-arts ne sont pas forcément intéressés par les structures d’art contemporain, comme les FRAC.

C’est certainement grâce à ce constat que le FRAC Normandie Rouen développe un partenariat avec la Réunion des Musées Métropolitains de Rouen, et particulièrement le Musée des Beaux-Arts. Certes le dialogue d’œuvres contemporaines avec des collections des musées de beaux-arts n’est pas nouveau, mais souvent il s’agit de prêts de multiples institutions. Ici la singularité tient au partenariat.

Résonance est donc une exposition, en deux parties et sur ces deux lieux, qui souhaite présenter les acquisitions du FRAC au regard des collections emblématiques de beaux-arts, unies par des thèmes communs.

Les visiteurs sont témoins de la transversalité des œuvres contemporaines, peuvent établir une réflexion sur les problématiques du passé qui résonnent encore au présent, et constater comment certaines observations ont pu perdurer ou évoluer.

Par exemple, la nature a été un sujet de prédilection au cours de l’histoire de l’art : observation de son environnement, étude des couleurs et des formes, fixation de l’éphémère sont autant de façons construisant les œuvres du passé. Les artistes contemporains poursuivent ces démarches mais avec de nouveaux médiums, et parfois avec un regard critique davantage dénonciateur.

Thomas Barbery rocher à Marée basse
©Thomas BARBEY, Rochers à marée basse IV de la série « Rivages », 2015.
Collection FRAC Normandie Rouen

Les œuvres ainsi réunies créent la surprise : les musées de beaux-arts regroupent en majorité des œuvres des siècles passés qui prônent facilement la technique du dessin, la maîtrise des couleurs, les mythes et événements du passé. Y insérer des œuvres contemporaines trouble les attentes du visiteur, le surprend et remet en question sa projection de ce qu’est un musée de beaux-arts.

De même, un visiteur au FRAC ne s’attend pas nécessairement à trouver des huiles sur toile anciennes qui ouvrent un autre imaginaire, à d’autres perspectives.

Cette alliance de l’ancien et du contemporain peut déstabiliser, mais permet surtout de faire découvrir des œuvres inhabituelles, ouvrir sa curiosité et légitimer sur le même plan les deux styles artistiques. L’art contemporain a encore du mal à convaincre le grand public de son intérêt et de sa créativité ; il reste souvent considéré comme intellectuel, compliqué et réservé à une élite.

Même si des visiteurs réfractaires à l’art contemporain viennent à critiquer cette double exposition, l’initiative reste intéressante et mérite l’attention : l’esprit critique s’aiguise ici, le regard change, la surprise s’installe, les questionnements sont en ébullition et la curiosité peut s’animer. Les clés de compréhension s’interprètent librement ou se cherchent dans le livret de salle. De multiples actions culturelles permettent également de découvrir différemment l’exposition.

Les plus réfractaires n’oublieront pas de lâcher la fameuse critique : « Quand je pense que nos impôts servent à acheter ces trucs que je peux faire moi-même ». La mauvaise foi l’emporte face à la surprise, puisqu’en réalité selon l’association Platform qui réunit les vingt-trois FRAC français, le coût par contribuable d’un FRAC s’élevait à 0,43 euros en 2014*.

Mais peu importe, le FRAC Normandie Rouen ose sortir de sa zone de confort qu’est son lieu d’exposition habituel et fait connaître une collection qui appartient à tous. L’objectif n’est pas de plaire à tout prix, mais de rendre compte, de faire découvrir et d’éveiller.

* Source : https://frac-platform.com/uploads/synthese-chiffresmcc2013-14-web.pdf

Chloé Maury

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