Les réseaux sociaux se sont imposés comme l’un des moyens privilégiés de communication, d’information, de diffusion ou de promotion des musées. Le nombre de followers et de partages a de nombreuses vertus rajeunissantes : il redynamise l’image, popularise, modernise… La présence du musée sur les réseaux sociaux le rend tout de suite plus cool. L’image est sauve (ouf !).

Les institutions culturelles peuvent aussi se servir de ce formidable outil numérique pour se concentrer sur l’une de leurs missions principales : la démocratisation culturelle ! Mais oui, qui mieux que les réseaux sociaux pour remplir cette mission dans ce cas où la seule barrière d’accessibilité serait l’accès à une connexion internet ? Ils sont accessibles par tous, pour tous, presque partout, à n’importe quel moment et quelle qu’en soit la durée.

Éclairons tout de suite un point, il ne s’agit pas de substituer la visite in situ mais plutôt de compléter, de varier l’expérience du musée et de donner envie aux personnes de venir dans l’institution. Sur les réseaux sociaux l’institution culturelle va pouvoir susciter l’intérêt, piquer la curiosité des « socialeurs » sans pour autant les écraser sous le poids de l’exactitude scientifique et historique. Car, pour reprendre Michel Serres, une fois que « petite poucette » est intéressée, elle ira chercher le savoir, la connaissance scientifique par elle-même. Elle ira peut-être même chercher ce savoir au musée, lieu de connaissance et de science mais aussi lieu de délectation et d’enrichissement. Et ces deux derniers points peuvent lui paraître beaucoup moins évidents.

Sur les réseaux sociaux,  il s’agit de mener des actions culturelles pour et avec les publics. Twitter, Facebook, Snapchat… c’est aussi interférer avec la vie quotidienne des gens, partager un moment, se rencontrer. Le musée peut sembler plus proche, plus accessible quand il n’y a pas la barrière de la billetterie et que les personnes peuvent directement et instantanément s’engager dans les actions culturelles proposées. Car les institutions doivent aussi rencontrer le visiteur, sans filtre, pour ainsi provoquer un enrichissement, une acculturation.

Tout repose sur l’idée du participatif. Il faut laisser les gens s’approprier un contenu, ne pas vouloir le contrôler (ce qui inévitablement briserait le charme). Aller du participatif au collaboratif voilà un bel objectif pour des musées qui sont avant tout un service public (nous avons tendance à l’oublier un peu trop souvent).

Voici un focus sur trois exemples d’actions culturelles menées par des institutions qui présentent plus d’un intérêt :

Les live-tweet

En 2015, à l’occasion de l’exposition Le roi est mort, le château de Versailles a retracé sur Twitter les derniers jours de Louis XIV tels qu’ils se dérouleraient à notre époque. L’action permetde mettre l’accent sur l’anecdote et de révéler la petite histoire, peut-être plus méconnue que la Grande. Maïté Labat, chef des projets multimédias au Château explique sur France 24 : « On s’est demandé comment on aurait raconté cette histoire si Louis XIV était mort aujourd’hui. Et de fait, Twitter s’est rapidement imposé, notamment comme première interaction avec les internautes, car c’est un outil qui favorise et crée le dialogue permanent avec le public. » Car le visiteur s’empare de l’histoire et peut la moduler, se l’approprier par ses commentaires, ses retweets. En voici un exemple publié sur France 24. Il s’agit d’un commentaire de @velkounette à l’annonce du départ de Madame de Maintenon de Versailles, l'une des favorites du Roi Soleil, le 30 août : "Je confirme ! Je l’ai vue dans le RER tout à l’heure !".

Retweet "Le roi est mort" © EPV

Mais cette initiative n’est pas isolée et en 2014 le Musée de la Grande Guerre du pays de Meaux fait office de précurseur avec la création du compte Facebook d’un poilu, Léon Vivien. Durant cinq mois, des publications ont couvert la vie quotidienne du soldat jusqu’à sa mort comme si  Facebook existait en 1914. Cette action permet non seulement de valoriser les collections du musée avec la publication de photographies mais permet aussi à près de 65 000 personnes de revivre une partie de l’histoire.

Le « tracking des habitants », dispositif de la Halle aux sucres de Dunkerque

Partager son circuit dans la ville, voilà ce que propose la Halle aux sucres aux Dunkerquois et plus globalement aux habitants des Hauts-de-France. Chaque personne peut ajouter et partager son trajet quotidien sur une carte interactive via une application mobile développée par Orbe. Pour cela rien de plus simple. Il suffit de se géo-localiser, d’enregistrer son circuit quotidien et de le partager sur une carte interactive qui devient alors le réseau de tous ces chemins entre croisés.L’habitant est acteur et pas uniquement consommateur du lieu culturel. Bémol : Comment donner envie aux habitants d’utiliser un outil pour trace ret partager leurs chemins quotidiens ? Le dispositif participatif a du mal à prendre l’ampleur souhaité puisqu’il dépend entièrement des Dunkerquois qui ne l’utilisent tout simplement pas. Cela vient peut-être du nom très peu accrocheur de l’application : « tracking des habitants ». Oui, nous pouvons le dire, ça fait peur. Surtout, cette action pose la question de la limite des dispositifs participatifs quand les habitants ont du mal à s’en emparer. C’est peut-être ce qui résulte de la démarche de faire quelque chose pour les gens mais sans les gens…

"Tracking des habitants" © Orbe

Le Rijkmuseum sur Youtube

C’est la plateforme qu’a utilisé le Rijkmuseum pour annoncer sa réouverture en 2013. La vidéo est une opération de communication certes. Mais c’est aussi une action culturelle hors-les-murs aussi surprenante qu’inattendue. Dans un centre commercial d’Amsterdam, les gens qui faisaient tranquillement leurs courses sont pris à partie et emmenés dans une histoire folle de voleur au XVIème siècle. Il s’agit de mettre des personnes en action autour d’une rumeur, de l’anecdotique et ce grandeur nature. Nous pouvons facilement imaginer que ces personnes vont avoir envie d’aller au musée ensuite. Qu’ils regarderont certaines œuvres plus attentivement car ils auront rencontré les personnages au hasard d’une session shopping, auront vécu une expérience palpitante et que les œuvres feront partie de leur histoire. Onzehelden zijn terug ! (Nos héros sont de retour !)

https://www.youtube.com/watch?v=a6W2ZMpsxhg

D’autres initiatives sont courantes notamment sur Instagram avec des jeux concours ou la proposition aux publics de choisir les œuvres des expositions comme l’a fait le Columbus Museum of Art en 2013. Les institutions culturelles sont aussi présentes sur Snapchat comme le LACMA (Los Angeles) qui utilise ce réseau avec beaucoup d’humour et invite les visiteurs à s’amuser avec les collections.

M.D.

#réseauxsociaux

#participatif

#actionculturelle

Pour en savoir plus sur les live-tweet : http://www.france24.com/fr/20150901-france-chateau-versailles-mort-louis-xiv-twitter-exposition-leroiestmort

Pour en savoir plus sur l’utilisation de Snapchat par le LACMA : http://www.club-innovation-culture.fr/en-rejoignant-snapchat-le-lacma-incite-son-public-a-jouer-avec-sa-collection/

Pour en savoir plus sur la Halle aux sucres: http://lartdemuser.blogspot.fr/2017/09/la-halle-aux-sucres-histoire-dun.html