Après les attentats de Charlie Hebdo, que nous avons évoqués dans deux articles sur  le blog (ici et ), l’exposition Femina, la réappropriation des modèles qui devait se tenir à Clichy-la-Garenne du 25 janvier au 26 avril a pris fin début février, soit juste après son inauguration.


Silence
de Zoulikha Bouabdellah © Gallerie Anne de Villepoix

 

Musées et expositions subissent fortement l’actualité depuis janvier 2015...

Tout est parti d’une œuvre de l’artiste franco-algérienne Zoulikha Bouabdellah, Silence, qui était devenue trop sensible pour certains. Silence questionne la place des femmes dans la religion par 28 paires d’escarpins disposées dans des trous faits à 28 tapis de prière. Après les attentas de janvier, la thématique abordée est apparue susceptible de causer d’éventuels incidents irresponsables. Pour soutenir Zoulikha Bouabdellah, toute l’exposition a été décrochée.

Plus récemment c’est le musée irakien de Mossoul qui a souffert. De très nombreuses œuvres ont été violemment détruites par Daesh, vidéos à l’appui. Mais si le monde de l’art, de la culture (avec le monde entier) s’indigne et souffre de ce que vivent les musées et les expositions, il essaie aussi de trouver des solutions. 

Privée de toute visite l’exposition Femina ? Pas si sûr. Détruites et destinées à être oubliées à jamais les œuvres du musée de Mossoul ? Peut-être pas. Car si les musées réels, physiques sont touchés par toute cette actualité, ce n’est pas le cas des musées virtuels. Et ce sont eux qui naissent dans de tels moments et redonnent un souffle d’espoir à la culture. 

L’exposition Femina qui voulait mettre en valeur la création artistique féminine se visite désormais en ligne.  Avec une vue à 360° vous pouvez vous déplacer dans les salles de l’exposition, du rez-de-chaussée à l’étage et pouvez admirer les œuvres qui étaient présentées. Cette mésaventure n’empêchera surement pas le cycle d’expositions sur les femmes artistes commencé par la Galerie Les filles du calvaire de continuer pour s’achever avec Et les autres minorités dont les dates ne sont pas encore connues.

Les œuvres du musée de Mossoul, quant à elles, reviennent peu à peu à la vie, grâce à la création d’un musée virtuel, d’une plateforme où chacun peut participer pour recréer en 3D les œuvres détruites. Malgré leur destruction physique, elles revivent ainsi sur nos écrans et pourront peut-être un jour à nouveau exister de façon matérielle. 

Capture d’écran de l’entrée de la visite virtuelle de Femina, la réappropriation des modèles.

 

Le musée virtuel comme réaction

Dans de telles circonstances, le musée virtuel prend un nouveau sens. Non seulement il permet de rendre les œuvres accessibles au plus grand nombre mais surtout, c’est une réaction face à l’actualité.

Une exposition ne peut pas se faire car l’une de ses œuvres est trop sensible ? Qu’à cela ne tienne ! S’il est compliqué, sans soutien, de la maintenir visible dans le lieu prévu, la faire vivre et revivre de manière virtuelle est un moyen pour l’artiste, de continuer à partager son travail, ses réflexions. C’est une manière de répondre à cette pression et ces craintes. Précisions que Silence n’a pas été créée en réaction aux attentats de janvier. L’œuvre a pris un sens nouveau avec l’actualité. Cette résonance participe de sa force, de son intérêt et de sa pertinence. 

De la même manière, le Project Mossoul est une arme contre Daesh et son souhait de détruire tout un pan de l’héritage culturel mondial. Détruire des œuvres ne détruit pas toutes leurs traces, tous les souvenirs qu’elles ont laissées. Et grâce aux avancées technologiques, à la modélisation 3D, ces œuvres continuent à vivre et pourront à nouveau voir le jour. Plus que cela, ce projet de musée virtuel collaboratif pourrait aussi permettre de reconnaître et suivre les objets pillés et revendus. 

Modélisation 3D du mihrab de la mosquée Banat Al Hasan © ruimx 

 

Bien entendu, les musées virtuels comme les musées réels ne sont pas protégés de toutes les menaces. La cyberattaque qui a frappé TV5 Monde dernièrement le montre bien. Le virtuel n’est pas exempt de toute menace. Mais, dans de telles situations, c’est tout de même un beau soutien que le numérique offre aux musées.

 

Aénora Le Belleguic-Chassagne

A consulter : - http://sisso.fr/vv/femina/#/salle_femina_1/

http://projectmosul.org/# Musée virtuel# Actualité# Réaction