Depuis une quinzaine d’années, le numérique s’est implanté dans le domaine de la culture. Les premiers services numériques ont été créés dans les musées et de nombreuses initiatives ont vu le jour dans un esprit d’expérimentation et d’innovation. Aujourd’hui, le numérique dans la culture a atteint un « âge de raison ». Il est temps de faire le bilan sur plusieurs années d’expérimentations tout en continuant à être attentif à ce qui se fait dans les autres domaines et à explorer les possibilités du numérique qui semblent infinies.

La définition de la transformation digitale varie en fonction des domaines qu’elle concerne. Pour une organisation, la transformation digitale désigne le processus qui consiste à intégrer pleinement les technologies numériques dans l'ensemble de ses activités. La transformation digitale d’un musée concerne alors l’ensemble de ses services, des ressources humaines au développement culturel en passant par la conservation.

Pour une institution culturelle, la transformation digitale inclut des mutations en interne à commencer par un changement dans les missions octroyées aux services numériques. Jusqu’alors, les établissements culturels regroupent l’ensemble des compétences digitales dans un seul service ou en une seule personne selon les capacités de la structure. Or, avec la transformation digitale, chaque service d’une institution culturelle est amené à utiliser les technologies numériques sans pour autant en avoir les compétences. Dans cette logique, les services numériques tendent de plus en plus vers un décloisonnement de leurs compétences afin d’accompagner l’ensemble du musée. Il joue un rôle de facilitateur auprès des autres services.

Les mutations induites par la transformation digitale concernent également la diversification des collaborations avec des partenaires technologiques. Le Google Cultural Institute, La fondation Orange, Dassault system et autres startup de la French Tech sont autant de partenaires technologiques envisageables pour une institution culturelle. Outre la mise à disposition de compétences numériques de façon gratuite, ce type de partenariat permet aux institutions culturelles de participer à des projets de très grandes envergures et d’acquérir une visibilité grand public. Pour les entreprises technologiques, un partenariat avec une institution culturelle répond à des enjeux d’image et de visibilité.

 

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 Numérisation en gigapixel d’une robe des collections de la Cité de la dentelle et de la mode à l’occasion du projet #WeWearCulture de 2017 du Google Cultural Institute et réalisation d’une exposition virtuelle © GOOGLE CULTURAL INSTITUTE

 

Le projet We Wear Culture inauguré par le Google Cultural Institute en juin 2017 regroupe des centaines de partenaires culturels dans le monde. En France, les partenariats ne sont pas établis uniquement avec les institutions de grandes envergures. Si le château de Versailles et les Arts Décoratifs sont partenaires, le Google Cultural Institute a également travaillé avec la Cité de la dentelle et de la mode de Calais. Ces partenariats se traduisent par la création d’expositions culturelles, la numérisation des collections ou la réalisation de vidéos à 360°. Ce type de partenariat peut être une réelle opportunité pour les structures de taille moyennes à condition que la communication en soit assurée. En effet, si aucun élément de communication in-situ ne renvoi aux actions culturelles numériques de l’institution, ces dernières peuvent passer inaperçues.

Aujourd’hui, la transformation digitale peut permettre de résorber la fracture numérique entre les grandes institutions culturelles disposant d’un service numérique et les plus petites structures. Quels que soient les moyens financiers dont dispose la structure, l’enjeu est le même pour tous. La diversité des partenariats gratuits et l’utilisation de fonctions gratuites telles que les réseaux sociaux permettent aux musées de différentes envergures d’émerger sur la toile. La gestion de ces outils demande des moyens humains dont les structures ne disposent pas forcément. En revanche, le personnel peut plus aisément suivre une formation et établir un calendrier de publication sur les réseaux sociaux. Il s’agit bien plus d’une question de volonté et d’innovation que de moyens financiers.

Avec le numérique, les lieux de culture s’hybrident et se réinventent. Les formes et les pratiques changent. C’est le cas par exemple des Micro-Folie dont les deux premières ont vu le jour en janvier 2017 à Sevran et en juin 2017 à Lille. Inspirés des Folies du Parc de La Villette conçues par l’architecte Bernard Tschumi, ces lieux culturels sont organisés autour de trois modules : le Musée numérique, le café Little Folie et l’Atelier (sur le modèle d’un mini FabLab). De nombreuses institutions culturelles sont partenaires du Musée numérique permettant ainsi la diffusion d’œuvres majeures du patrimoine. Il s’agit d’un lieu de vie et de rencontres, pour valoriser les initiatives locales mais aussi stimuler la créativité et l’innovation autour de la coopération et l’échange des savoirs.

 

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 Micro-Folie de Lille inaugurée en juin 2017 : musée numérique © Maison folie Moulin

 

Le numérique répond à des enjeux d’action culturelle et de démocratisation de la culture. Les dispositifs numériques provoquent des changements dans la nature des relations entre le musée et son public. Le visiteur devient de plus en plus acteur de sa visite et a la possibilité de répondre aux initiatives citoyennes insufflées par le numérique.

Les notions de plaisir et de délectation qui définissent le musée sont davantage assumées par les lieux culturels à travers le numérique. L’hybridation des lieux de culture, l’élargissement des pratiques culturelles et la diversification des supports technologiques sont autant de mutations provoquées par la transformation digitale au service de la démocratisation culturelle.

 

M.D.

 

En savoir plus sur le projet We Wear Culture :
https://www.google.com/culturalinstitute/beta/project/fashion

En savoir plus sur les Micro-Folie :
https://lavillette.com/micro-folie/

 

Merci à Maïté Labat pour nos précieux échanges.