Lors de son épopée suisse, la caravane arrageoise s’est arrêtée le temps d’une matinée à L’Alimentarium de Vevey. Monsieur Denis Roher, conservateur du musée, nous a accueillis et guidés au sein de cette institution entièrement dédiée à l’alimentation. Cette rencontre nous a permis de comprendre l’évolution du musée, ses partis pris mais également ses projets, car le musée prépare sa troisième version et fermera ses portes en 2014 pour deux ans de rénovation.
Muséographier l'alimentation
Crédits : Camille Savoye
Le caractère éphémère de l’aliment nécessite d’engager une réflexion sur l’objet à exposer. Celui-ci est en effet valorisé pour le sens qu’il permet d’apporter à l’exposition et non pas pour parler de la collection du musée. Dans cette muséographie du discours « l’objet est utilisé comme moyen de mise en scène permettant une visualisation explicative des faits absents »(Shärer, 2003). L’exposition permanente présente ainsi des objets qui gravitent autour de l’aliment et le parcours de la visite se décompose en quatre espaces thématiques : acheter, cuisiner, manger et digérer. Le restaurant du musée s’inscrit au sein même de la démarche de l’institution et se présente comme un dispositif d’exposition vivant. Cet espace est accessible par l’entrée générale du musée, les cuisines sont ouvertes et proposent des menus en adéquation avec les expositions, les saisons et les thématiques déterminées par la direction.
L’alimentation est un objet d’études complexe et passionnant qui s’insère au sein de nombreux domaines : des implications liées au corps à un aspect sociologique, d’une approche anthropologique à celle économique ou encore écologique. Ces différentes approches sont exploitées tout au long du parcours et intègrent l’ensemble des espaces muséographiques par le biais de dispositifs qui questionnent et interpellent. En arrivant dans l’espace acheter, deux grandes tables sont accrochées à la verticale le long du mur, sur celles-ci sont disposés les différents produits de consommation courante au XIXème siècle pour l’une et au XXIème siècle pour l’autre. Ce dispositif permet non seulement de comparer les différents modes de consommationmais également de penser à l’évolution des manières de tables et de questionner nos propres habitudes de consommation. La médiation orale, qui sera privilégiédans la troisième version du musée, permet d’exploiter toute la richesse de ce dispositif.
Médiation de la cuisine
Crédits : Camille Savoye
Valoriser une médiation orale semble en effet opportun pour un musée vivant ou le visiteur expérimente tout au long de sa visite. N’est-ce pas, par ailleurs, la meilleure façon d’aborder l’alimentation, par le biais du partage et d’une démarche conviviale ? Ce caractère inhérent à l’alimentation est par ailleurs très bien exploité dans la partie cuisine du musée où de nombreux ateliers sont animés par les médiateurs-cuisiniers. Les ateliers permettent d’explorer l’aliment selon des thématiques, déterminées géographiquement ou historiquement. Ces ateliers ne sont pas conçus pour apprendre à manger équilibré mais pour expérimenter, découvrir des cultures à travers leur alimentation et interpeler notre palais. Chaque participant repart avec sa préparation, une belle occasion de partager chez soi l’expérience vécue au musée et de prolonger sa visite.
La cuisine semble avoir pris beaucoup de place au sein de la structure au fil des années, ce qui ne semble pas être au déplaisir du public : le musée enregistre en moyenne 65 000 entrées par an, composé d’autant d’adultes que d’enfants. Afin de rééquilibrer le musée et d’insérer une approche plus scientifique Monsieur Denis Rohrer, conservateur du musée, souhaite mettre en place une politique d’acquisition afin d’enrichir la collection. Bien qu’il s’agisse d’une fondation Nestlé celle-ci ne se constitue non pas autour de l’entreprise mais bien sur l’alimentation en général.
Crédits : Camille Savoye
Camille Savoye