Avez-vous déjà consulté un marabout africain en un lieu isolé pour résoudre vos problèmes ou exaucer vos souhaits ? Avouez, vous y avez au moins pensé... Avez-vous déjà planté avec des épingles une poupée, faite à l'image de votre ennemi, pour lui infliger les pires souffrances ? Vous avez au moins tenté l'expérience avec celles de Nicolas Sarkozy ou de Ségolène Royal ...

Donner la parole aux initiés

Faire tomber les clichés associés au vodou* et révéler cequ'est réellement cette religion, tels sont les objectifs de l'exposition Vodou, présentée du 15 novembre 2012 au 23 février 2014 au musée Canadien de l'Histoire (anciennement musée Canadien des Civilisations)de Gatineau, au Québec). L'exposition a été réalisée en partenariat avec la Fondation pour la préservation, la valorisation et la production d’œuvres culturelles haïtiennes (FPVPOCH). L'exposition Vodou vise donc d'abord à déconstruire la conception européenne et stéréotypée de cette croyance, puis à présenter notre point du vue à nous, adeptes du vodouhaïtien. Car voyez-vous, la « vérité » est principalement rétablie en donnant la parole aux initiés de cette religion. Apprêtez-vous à laisser vos préjugés derrière vous et à découvrir une réalité méconnue du commun des mortels !

Des clichés qui collent à la peau

Vue générale d'une salle de l'exposition (deuxième partie) Crédits :Diane Westphal

La première partie de l'exposition dresse un rapide historique du vodou haïtien et l'origine des préjugés qui lui sont associés. Le vodou est une religion syncrétique, issue des traditions spirituelles des esclaves africains et autochtones (caribéens). Saviez-vous, cher visiteur, que sa pratique a été longtemps interdite, et que les vodouisants ont été persécutés ? Le vodou est officiellement reconnu en Haïti en 2003. Bien entendu, une pratique clandestine existait avant cette reconnaissance. Cette pratique était très mal vue des Européens justement en raison de son caractère secret. C'est ainsi qu'une vision « barbare » et réductrice de notre croyance fut diffusée par les médias de masse, notamment américains, qui contribuèrent largement à forger les stéréotypes du vodou. L'exemple le plus connu est certainement la poupée fichée d'épingles. Or, il est possible que cette image vienne en réalité de certaines pratiques de l'Afrique de l'ouest (notamment du Congo). Dans cette région, des statues de bois à taille variable, à figure humaine ou animale et plantée de clous, servent d'intermédiaires entre le monde des vivants et celui des morts. Par le biais de ces objets appelées Nkisin'Konde, les vivants sollicitent l'aide des ancêtres afin de résoudre les problèmes de la communauté. Chaque clou représente une demande particulière et les statues étaient manipulées par un sorcier. Ça vous en bouche un coin, non ?

Des vertus curatives

Vue d'une salle avec "poupées" vodou grandeur nature (deuxième partie) Crédits : Diane Westphal

 

Dans la deuxième partie de l'exposition, le vodou vous est présenté par ses adeptes. Vous serez étonnés de découvrir que cette religion a principalement des fonctions thérapeutiques. Voyez-vous, pour nous, les maux physiques et psychiques d'une personne ou d'une communauté sont les signes d'équilibre du monde rompu. Afin de rétablir cet équilibre, nous faisons appel à des puissances surnaturelles, des esprits possédant des pouvoirs particuliers, les lwa,afin de se concilier leur aide.La possession représente le moyen privilégié de communication avec les esprits. L'assistance des lwa est sollicitée lors de rituels, durant lesquels nous leur adressons des offrandes. La pratique collective est importante dans le vodou. Cependant, chaque vodouisant a également un rapport très personnel à sa religion. Vous pouvez vous en rendre compte par les nombreux témoignages d'initiés que nous présentons sur des bornes vidéos. Les adeptes relatent leurs expériences cérémonielles, leur conception du vodou et les raisons qui les ont amenés à cette croyance. Concernant la scénographie, nous avons choisi une ambiance relativement immersive. Nous voulons en effet vous amener à être au plus proche de la religion vodou. Nous avons donc choisi de projeter dans une des deux salles un film montrant un rituel. Nous avons également recherché une certaine proximité entre le visiteur et les objets. De nombreux artefacts cérémoniels, tel des ex-votos, des offrandes et des reconstitutions d'autels sont en effet disposés sur des plates-formes basses, sans vitrine (vous remarquerez d'ailleurs qu'il n'y a aucune vitrine dans l'exposition). La mise à distance est simplement créée par la présence de piquets entre les objets et l'espace de déambulation.

Alors ?

Autel vodou. Crédits :  Diane Westphal

 

La troisième partie de l'exposition vous est exclusivement dédiée, cher visiteur. Dans cet espace, nous vous invitons en effet à donner votre avis sur l'exposition. Pour cela, vous pouvez vous exprimer oralement et être filmé dans l'espace d'une petite alcôve. Votre témoignage sera par la suite transmis automatiquement sur des postes informatiques, à partir desquels les autres visiteurs pourront voir et écouter les expériences de visite de ceux qui ont laissé un commentaire.

La visite s'arrête ici. Nous espérons que vous ayez passé un agréable moment de découverte. Nous espérons que cette exposition vous auras appris la réalité sur la religion vodou. Qu'elle n'inflige pas le mal, mais au contraire, sert à soigner les maux des personnes et de la société.

*vodou : orthographe créole, qui tend à supplanter l'orthographe européenne « vaudou »

Diane Westphal

 

Pour en savoir plus :

Lien vers l'exposition

Feuillet d'accompagnement

Glossaire

Article de presse