En 2006, au premier étage du musée national de Géorgie, sur la grande avenue Roustaveli, équivalent des Champs Elysées à Tbilissi, a été  inauguré un nouveau musée : le musée de l’occupation soviétique.

La Géorgie, au long de son Histoire, a souvent été occupée : par les Romains, les Turcs, l’Iran, l’empire russe… D’ailleurs,la ville cosmopolite et bigarrée qu’est Tbilissi suffit à en témoigner. Elle n’a pas dédié un musée à chacune de ces périodes. Cependant l’occupation soviétique se distingue parce qu’elle est récente, particulièrement meurtrière et fait écho à l’occupation très actuelle de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud.De plus, la Géorgie se remet encore de la guerre civile qui a suivi son indépendance : le pays a besoin d’apaisement et de cohésion interne. Toutes ces raisons ont présidé à la naissance de ce musée plein d’émotions preuve d’une certaine réappropriation (et interprétation ?) par les Géorgiens de leur Histoire.

Situation géopolitique en Géorgie @ Vincent Jauvert. Nouvel Obs

 

Ce « musée » est davantage une aile du musée national. Il est constitué d’une antichambre suivie d’une grande salle de réception rectangulaire surmontée d’une mezzanine étroite et périphérique. La grande salle est organisée comme le bureau d’apparat d’un dirigeant soviétique en Géorgie : des drapeaux de l’URSS décorent l’allée qui mène à son bureau. Sur la mezzanine ce sont les lettres, en russe, vestiges du pouvoir bureaucratique de Moscou qui s’appliquait implacablement en Géorgie.

Sur les murs de la salle des vitrines, des photos, des films d’archive et des cartels présentent les grandes étapes de cette domination économique et politique : la brève République parlementaire géorgienne indépendante, l’imposition d’un modèle politique révolutionnaire, l’étouffementdes résistances et enfin la libération du pays.

Reconstitution du bureau d'un dirigeant communiste à Tbilissi @ Khees sur Eklablog

En réalité ce musée est avant tout un hommage aux victimes de guerre, au détriment parfois d’informations sur la vie quotidienne sous l’occupation. On pouvait s’attendre à en apprendre sur les difficultés économiques du pays, le rationnement, la réglementation inadaptée et sévère … Les Géorgiens ont plutôt choisi de souligner les déportations et les morts avec la part d’émotions endeuillées que cela implique. La grande salle est couverte de photographies et objets personnels (papiers d’identité, journaux intimes) des victimes politiques de l’occupation soviétique. Il s’agit donc de  contestataires du régime et des grandes familles aristocratiques de Tbilissi. Des chiffres, imprimés en gros sur les murs et les cartels, dénombrent les déportés ou les morts.

Enfin l’antichambre est particulièrement suggestive puisque y est reconstitué un wagon de bois criblé de balles où furent fusillées des familles de l’aristocratie. Le wagon est éclairé en rouge et, quand on le regarde, on entend derrière soi des déflagrations venant d’un film diffusé sur un autre mur.

Ce musée n’a pas une vocation d’information exhaustive sur cette période d’occupation. L’implication des Géorgiens dans le système soviétique à Moscou ou à Tbilissi par exemple est passée sous silence. Par contre il est un bel hommage aux résistances et aux victimes, à la manière géorgienne : très expressive, poignante et un peu partiale.

Eglantine Lelong

#Pays d’ex-URSS #Deuil #Géorgie

Site du musée : http://museum.ge/index.php?lang_id=ENG&sec_id=53

Pour aller plus loin :

 http://www.liberation.fr/monde/2010/06/16/staline-occupe-la-georgie_659320

Sources images :

http://globe.blogs.nouvelobs.com/archive/2008/04/30/russie-georgie-bientot-la-guerre.html

http://credintravel.eklablog.com/musee-national-de-tbilissi-a79981203?noajax&mobile=1