A l’occasion d’un stage au MUba Eugène Leroy de Tourcoing, j’ai eu la chance de participer au premier renouvellement des collections pour l’année 2014. Créé en 1860, et anciennement dénommé Beaux-Arts de Tourcoing,  le MUba Eugène Leroy présente ses collections dans un dialogue permanent entre art classique, art moderne et artcontemporain. Peintures, dessins, estampes, sculptures se côtoient dans les parcours où l’on croise par exemple Boilly ou Rembrandt en écho avec les contemporains Antoine Petitprez, Philippe Cazal ou encore avec des figures du xxe siècle comme Martin Barré ou bien sûr Eugène Leroy.

Les collections permanentes occupent la moitié de la surface d'exposition. Leur accrochage est régulièrement renouvelé pour faire écho aux grandes expositions temporaires programmées deux fois par an. L’exposition Permanente / Provisoire a été repensée à travers le thème de la forme et de la sculpture afin de faire écho aux deux expositions temporaires réalisées par le MUba. Le musée des Beaux-arts de la ville propose une grande rétrospective de l’œuvre de l’artiste contemporain autrichien Elmar Trenkwalderet une exposition plus réduite sur la forme et le design pratiquée à la Manufacture de Sèvres par le biais de vases. Ces expositions sont visitables depuis le 17 avril jusqu’au 24 novembre 2014, alors n’hésitez pas à vous y rendre car les expositions mais aussi le lieu valent le détour!

Vue de la salle d'exposition temporaire (c) F.Kleinefenn

L’exposition phare du moment "Ornement et Obsession" est la première rétrospective organisée autour de l’œuvre fantasmagorique d’Elmar Trenkwalder. L’amateur confronté pour la première fois à l’art de cet artiste autrichien, qu’il s’agisse de ses dessins, de ses premières peintures ou des sculptures de terre cuites des dernières années, n’a pas fini de s’étonner. Installé à Cologne au milieu des années 1980, l’artiste né en 1959 et qui vit aujourd’hui à Innsbruck,connaît un succès rapide avec des dessins et des tableaux d’inspiration symboliste dont les cadres, d’abord en moquette, puis en terre, font reculer le contenu du tableau vers la périphérie et l’élargissent. Les premiers travaux en terre émaillée de couleur frappent par l’extraordinaire expression physique du corps masculin dans la droite ligne d’une certaine tradition autrichienne de transgression des limites sexuelles.

Cette grande exposition présente l’œuvre monumentale de l’artiste, des peintures et dessins, en incluant et mettant en perspective les œuvres acquises par le MUba. Elmar Trenkwalder crée des sculptures monumentales en céramique. Ses structures et ses architectures qui rappellent l’art flamboyant du gothique tardif, fusionnent des formes imaginaires biomorphiques et végétales. La représentation figurative, quant à elle, est déformée, elle joue de symboles féminins et masculins. L'artiste dresse un panorama complexe, fantastique et délirant empreint de formes de l’histoire de l’art, des arts appliqués ou des arts populaires. La grande nef du MUba est emplie de ses œuvres créant une atmosphère particulière, quasi-magique. 

  Vue de la salle d'exposition Permanente/Provisoire(c) D. Knoff

En liaison avec l’exposition "ElmarTrenkwalder - Ornement et obsession" , l’exposition Permanente /Provisoire intitulée en réponse à la formule de Baudelaire "Un objet pas si ennuyeux que ça, la sculpture?", s’est façonnée à partir de la collection de sculptures du MUba, qui sont ainsi interrogées dans un parcours dynamique sur toutes les composantes de la sculpture, sa matière du marbre à la simple planche de contreplaqué, du bronze à la céramique, en passant par le bois de récupération, de la fonte d’aluminium au plâtre en passant par la terre ; son accrochage, sur un socle, sur le mur, directement au sol, dans l’espace, ou simplement représentée ; ou encore son sujet figuré, réaliste, suggéré ou abstrait. L’exposition Permanente / Provisoire est repensée comme une exposition temporaire, dont la présentation est renouvelée régulièrement. Le parcours de l’exposition propose une déambulation au rythme des œuvres exposées autour de la question de la sculpture selon le concept de la relation de l’art contemporain et l’art ancien. Ces nouvelles relations apportent un nouveau regard sur les œuvres en établissant entre elles des parallèles, multipliant ainsi les lectures possibles de l’œuvre. L’exposition permet de mettre au centre la question du rapport de l’œuvre au lieu et de son expérience.

Autour de ces expositions, le MUba Eugène Leroy, toujours dans un souci de faire dialoguer les arts et les formes, a pensé une exposition temporaire, "V de S", en étroit lien avec la Cité de la Céramique. Le parcours de l’exposition propose de circuler autour des vases et formes emblématiques de la Manufacture autour de la question du renouvellement des formes des vases et de l’étroit lien entre l’art ancien et l’art contemporain. Ces nouvelles relations, associant les plus grands créateurs internationaux aux collections du patrimoine national, apportent un nouveau regard sur les œuvres, multipliant ainsi les grilles de lectures possibles. La Cité de la Céramique représente l’excellence des métiers d’art et de lacréation en France. Les résidences exploratoires d’artistes et de designers qui s’enchaînent depuis des décennies à la Cité de la Céramique, occupent quotidiennement plus d’une centaine de céramistes d’art, et ouvrent l’horizon sur de nouveaux territoires et de nouvelles potentialités artistiques encore inédites. L’exposition propose un parcours au travers d’une double perspective : la continuité de la forme en blanc, que l’on retrouve chez Charpin, Arp ou encore Renonciat et les ruptures, qui ne sont qu’apparentes, proposées par de nombreux artistes et designers tels que Sottsass ou Biecher.

Pour tout cela et bien plus encore, venez découvrir ces expositions particulières et différentes mais toujours en dialogue les unes avec les autres et participant à l’éternelle quête de questionnement et de renouvellement que suit le MUba Eugène Leroy, exemple dont pourrait bien s’inspirer nombreuses autres structures.

Elisa Bellancourt