Lorsque le musée d'Orsay ouvre une exposition temporaire, il est difficile de l'ignorer. Quand on ajoute les cris poussés par le grand public à la vue d'un clip de promotion plutôt sensuel, mettant en scène des corps nus, tordus, pressés les uns contre les autres, allant jusqu'à en restreindre l'accès à la vidéo au moins de 18 ans, cela devient impossible. A force d'en entendre parler, et pour peu que le sujet soit intéressant, ou même juste intriguant, il y a forcément un moment où on trouve le moyen d'y aller (de préférence le jour où l'entrée est gratuite).

Et donc, au cas où personne ne le saurait, l'exposition « Sade. Attaquer le soleil » a ouvert, le 14 octobre 2014 et fermera le 25 janvier 2015. Déjà, le nom de l'exposition a de quoi attirer l'attention : une exposition parlant d'un personnage aussi controversé ? Je demandais à voir ! Parce que oui, la façon dont un sujet tel que cet homme, dont certains trouvent, qu'il avait du génie alors que d'autres ne veulent pas en entendre parler comme d'un véritable auteur, me questionnait. Et puis l'intitulé restait, pour moi, assez mystérieux.

Le résumé de la thématique consulté sur le site d'Orsay indiquait que la dimension qui serait abordée serait celle des micro-révolutions que l'œuvre de Sade aurait apportées aux normes artistiques de son époque, et qui resteraient encore d'actualité. Je vous livre un extrait du dit-résumé, juste pour vous mettre en bouche :

« L'œuvre du « Divin Marquis » remet en cause de manière radicale les questions de limite, proportion, débordement, les notions de beauté, de laideur, de sublime et l'image du corps. Il débarrasse de manière radicale le regard de tous ses présupposés religieux, idéologiques, moraux, sociaux. »

Tout un programme. Même si l'idée restait très nébuleuse.

 Franz von Stuck, Judith et Olopheme

Il faut que je précise quelque chose : je n'ai pas pris l'audioguide. Je pense que prendre un audioguide, pour voir une exposition, peut être enrichissant, mais ne doit pas être nécessaire. Le musée d'Orsay n'est pas réputé pour être le moins cher de Paris alors, me croyant maligne, j'y ai été le premier dimanche du mois, pour entrer gratuitement. Mais jen e m'attendais pas à devoir payer 5 euros pour l'audioguide de l'exposition temporaire. Par principe, j'ai dit non. La somme peut paraître modique, mais pas pour moi. En grève d'audioguide et armée de mes seules (et pauvres) connaissances scolaires sur le marquis de Sade, j'ai commencé la visite.

Etes-vous déjà entrés dans une salle de cinéma, en retard, pour vous rendre compte au bout de quelques minutes que vous vous êtes trompés de film ? Les premières salles, qui sont celles qui doivent donner envie de continuer, m'ont laissé une impression de grand fouillis. Plusieurs écrans où passent de vieux films noirs et blancs dont le nom n'est visible qu'à la fin de chaque extrait, des tableaux de plusieurs époques différentes, quelques citations de Sade aux murs... Et c'est tout. Pas d'explications. Juste cette sensation d'être au mauvais endroit. Et cette impression s'est renforcée au fur et à mesure de ma visite.

Pour être claire, je pense que le plus grand défaut de cette exposition est son manque d'explications et peu de supports de médiations mis en place. Je suis restée dans le brouillard le plus complet jusqu'à ce que, dans la troisième salle, je finisse par trouver (enfin) un panneau m'expliquant succinctement de quoi allait traiter l'exposition : l'influence des œuvres de Sade sur les formes artistiques de son époque jusqu'à aujourd'hui.

Une fois que la démarche expographique est clairement indiquée, les choses s'éclairent, et la recherche de liens logiques peut commencer. Par la suite, l'exposition se compose d'une multitude de pièces, de taille limitée, concernant chacune un thème bien précis, étudié en partant du point de vue de Sade, vers celui des peintres, sculpteurs, photographes ou autres qui l'ont représenté : le lien entre désir et violence, La luxure et la Révolution, le désir et l'infini, le sexe et la religion, etc. Tous cela par couple d'idées, dont les liens sont explicités par des œuvres et des citations des ouvrages de Sade.

Si il reste difficile de percevoir les limites entre les différentes « zones », c'est aussi que ces notions sont imbriquées les unes dans les autres. La multitude de sujets traités relève sans doute du parti pris par le commissaire d'exposition Annie Le Brun (auteur de plusieurs ouvrages sur Sade, et de l'exposition « Petits et grands théâtres du Marquis de Sade »). Cela a l'avantage de mettre en lumière la variété de sujets que le Marquis de Sade a traité au cours de sa vie, et le désavantage de perdre, encore une fois, le visiteur.

La scénographie reste très cohérente. Il faut reconnaître que ces espaces plutôt réduits par rapport à l'espace d'exposition permanente, installe une atmosphère plus calme, peut être même intime, bien que plutôt sombre, me faisant penser à ce qu'on appelait un boudoir à l'époque du Divin Marquis.

Je suis sortie avec des impressions plutôt mitigées de « Sade. Attaquer le soleil ». Je ne peux pas dire que j'ai vu l'exposition en détail, vu la taille du lieu, et je pense que l'audioguide doit être un support nécessaire à cette visite. Mais, ne l'ayant pas pris moi-même, cela reste une supposition.

Léa Gretchanovsky

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