C’est lors du mon aventure Muséomix à Lausanne que j’ai découvert l’immense laboratoire de fabrication présent sur le campus de l’université EPFL. Oui, un FabLab à Muséomix !

 Scénographie lumière de l’exposition Venice Time Machine © EPFL

 

C’est lors du mon aventure Muséomix à Lausanne que j’ai découvert l’immense laboratoire de fabrication présent sur le campus de l’université EPFL. Oui, un FabLab à Muséomix ! Pourquoi est-ce que ce lieu a-t-il participé à un événement initialement destiné aux musées ? L’Art Lab est un lieu d’innovation qui se confronte également aux problématiques muséographiques puisqu’il met en place un certain nombre d’expositions temporaires.

Cet espace se définit comme un lieu entre art et sciences. L’exposition Venice Time Machine, montée par les chercheurs et historiens de l’université, en collaboration avec le FabLab est une réelle machine à remonter le temps dans l’histoire de Venise. L’université détient un nombre incalculable de  numérisations d’archives sur la ville de Venise et elle a souhaité les présenter au public.

En apparence, le concept semble ne présenter aucun défaut. Cette simulation interactive reconstruit le passé de la ville par le biais de différentes techniques de visualisation telles que des cartes interactives en trois dimensions mais également des mises en scène muséographiques. Les moyens investis dans ce projet sont considérables. Au delà de l’aspect financier qui permet de se doter d’une masse de technologies nouvelles utilisées dans l’exposition, le travail en amont a été très important.Il se poursuit d’ailleurs aujourd’hui puisque les chercheurs ne cessent de dépouiller ces archives pour en découvrir le contenu.

Ce programme ambitieux a d’ailleurs fait l’objet d’une numérisation de ces archives, de mesure de conservation mais aussi d’organisation de cette grande masse de données. Le projet, lancé en 2013, semble aujourd’hui abouti en terme de muséographie et de scénographie. En pénétrant dans la salle d’exposition, la grande table centrale provoque un premier effet, on y découvre notamment un ensemble de témoignages de chercheurs, c’est derniers se retrouvent projetés sur les écrans apposés aux murs. Leurs visages semblent flotter au milieu d’une modélisation d’un réseau de la ville. Une atmosphère sombre mais ponctuée de faisceaux lumineux plonge le visiteur dans un espace proche de la fiction.

Venice Time Machine © EPFL

 

L’effet visuel est donc bien présent, mais l’ArtLab souhaite élargir son panel de visiteurs, qui est aujourd’hui trop cantonné au étudiants et chercheurs. C’est pour cette raison qu’a été mis à profit l’événement Muséomix pour repenser l’exposition. Le fond d’archives n’est pas accessible à tous de par son caractère très scientifique. Cet aspect limite réellement la compréhension du visiteur. Il s’agit également de rendre compte de la masse de données que l’université a en sa possession et qu’elle n’a d’ailleurs pas fini d’explorer.

L’équipe de museomixeurs formée de six personnes aux disciplines très différentes a dû imaginer un prototype répondant à ces enjeux. Mais comment rendre compte de la recherche scientifique tout en imaginant une interactivité qui faciliterait la compréhension du visiteur.

Après trois jours de dur labeur le projet naissant a vu le jour et s’est d’ailleurs confronté à l’avis d’un groupe d’experts et de visiteurs. 

 Énigmes du dispositif « La vérité est ailleurs » © A. E.

 

Le dispositif « La vérité est ailleurs » donne à voir la complexité de la recherche historique, mais offre également la possibilité de composer des récits singuliers, des tranches de vie de personnes réelles à partir des documents historiques. Il propose une découverte immersive et concrète dans l'histoire de Venise et de ses habitants à destination d'un public non averti.

Sous la forme d’un jeu, le visiteur se voit donner des consignes : “Retrouve Andrea qui a disparu, au travers d’un certain nombre d’énigmes et ce dans un temps limité; si tu relèves le défi, tu pourras repartir avec une copie de cette très belle bague”.

Le joueur incarne l'enquêteur, comme un chercheur qui fait des recherches historiques. Mais c'est un enquêteur ultra-connecté, qui s'appuie sur les données/datas produites parle projet, et qui sont une ressource dans laquelle puiser. Le jeu repose sur la géolocalisation de données, modélisées sur un fond de cartes existant, datant de 1808. Au fur et à mesure que le public progresse dans la résolution des énigmes, la maquette se modifie par un jeu de lumières : d’une mise en lumière totale au début, signifiant la présence d’Andrea quelque part dans Venise, puis la focale se resserre autour de lieux à l’activité d’Andrea. La spatialité de la ville rejoint celle de ses usages : où sont les marchands et lieux de commerce ? Où exerce-t-on le pouvoir ? Comment la vie économique, sociale est-elle organisée ?

Le jeu vise à amener le visiteur à se questionner : à quoi servent les données ? à chercher des indices, mais il faut les trier pour savoir où chercher… Quelles masses de données sont nécessaires pour obtenir les résultats demandés par les cinq énigmes ? Comment les chercher ? Les croiser ? Seraient-elles partielles, lacunaires, trompeuses ?

Ce dispositif ludique associe un jeu et une maquette interactive de la Sérénissime. Une application sur tablette propose une enquête et une exploration de la Cité des Doges au début du XIXème siècle. Une série de six énigmes successives nous mène sur la trace de l’orfèvre insaisissable qu’est Andrea. Quelques objets connectés et fac-similés ponctuent le parcours, unissant data impalpables et traces concrètes du passé.

Un dispositif conclusif vient donner une idée du volume global des données du Venice time project et celles qui ont été mobilisées pour mener cette enquête. C’est une invitation à aller plus loin dans la recherche.

Ainsi, les spécialistes mais également les visiteurs se prêtent au jeu malgré les dysfonctionnements du prototype par moments. Ils partagent leur expérience en revenant sur l’intrigue de l’énigme et ressortent avec la satisfaction d’avoir incarné le rôle d’un chercheur ou d’un historien le temps d’une visite. En prime, ils repartent avec la bague de l’orfèvre imprimée en 3D, ainsi qu’un passeport de l’enquêteur !

Ce dispositif a su déjouer l’aspect scientifique du fond d’archives tout en créant un lien direct entre le visiteur et ces données.

 

Anna Erard

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#museomixch2017


Pour en savoir plus :

http://www.museomix.org/editions/2017/lausanne

https://actu.epfl.ch/news/venice-time-machine-la-cite-des-doges-modelisee/

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