Du 26 au 28 novembre notre promotion du master MEM s’est associée avec celle du Master 2 Régie des Œuvres et Montage d’expositions d’Amiens, pour participer au Workshop Régie encadré par Serge Chaumier, Simon Texier et Sylvain Sorgato. Deux régisseurs du Musée des Beaux-Arts d’Arras, Marie Fouré et Stéphane Derancourt ont accompagné nos réflexions et nos gestes. Cet événement fut l’occasion d’une première expérience du conditionnement d’objets ! Les deux formations ont investi les locaux du Louvre Lens Vallées et de son Muséolab. Nous voilà partis pour prendre en main les machines du Fab Lab et les matériaux propres aux conditionnements.

Le Louvre-Lens Vallée se définit comme un lieu “centré sur l’humain” qui favorise et accompagne les transformations du territoire, en accord avec sa population. Véritable incubateur de projets à vocation culturelle, sa création se situe dans le prolongement du Louvre-Lens. C’est en ce lieu que se trouve le Muséolab, mis en place par l’université d’Artois et sous la direction scientifique de Serge Chaumier. Ce Fab Lab permet de construire des prototypes, notamment grâce à des imprimantes 3D, une découpeuse laser, et une machine de découpe au fil chaud. Le Fab Manager, Léo Marius, nous a aidé à nous approprier ces outils et à canaliser nos esprits curieux face à tant de nouveauté !

Avant le Workshop, nous avions chacune des expériences et/ou connaissances différentes à propos du travail de régisseur.se. Ce métier relativement récent (d’une quarantaine d’années) a pour mission, entre autres, d’assurer la conservation et l’inventaire des collections d’un musée. L’augmentation ces dernières décennies des prêts et des expositions temporaires justifie d’autant plus l’importance des régisseurs.ses. Le workshop nous a offert l'opportunité de mettre à profit les cours du master MEM dispensés par Anaïs Raynaud, ancienne régisseuse du Mémorial de la Grande Guerre de Meaux. Elle nous avait entre autres présenté les missions d’un service régie de musée et nous a accompagnées dans la confection d’un nuancier des principaux matériaux utilisés pour le conditionnement d’objets. A partir de cet outil, nous avions toutes en possession les connaissances des matériaux et supports nécessaires à la conservation des collections. Maintenant, place à la prise en main des matériaux ! 

Le Workshop Régie avait pour enjeu de nous familiariser manuellement avec les matériaux utilisés pour le conditionnement et de solliciter notre réflexion et curiosité autour des objets et des machines mises à disposition. Nos travaux furent pensés au prisme de l’écologie. À ce titre, du carton de récupération était disponible, et nous étions toutes attentives au gaspillage et aux réemplois des chutes. Nous avions également eu accès aux factures pour l’achat de matériel de régie. Cela nous a permis de quantifier le coût de production de nos conditionnements, et ainsi aborder un aspect très concret du métier.

Suite à la présentation du Muséolab et les différentes équipes de travail étant constituées (4 étudiant.e.s venant des deux formations), nous avons pris connaissance des expôts sur lesquels nous allions travailler. C’est avec une grande confiance que le Musée d’Histoire et d’Archéologie de Harnes nous a prêté une vingtaine d’objets datant des deux guerres mondiales. Être responsable pendant trois jours d’une collection historique s’est avéré très valorisant. Toutes les précautions professionnelles et de sécurité étaient évidemment de rigueur pour les manipuler. Présentant des problématiques et des états de conservations très différents, chaque groupe avait comme mission de proposer un conditionnement respectant toutes les spécificités de chacun de ces objets. La mixité des formations au seins des groupes de travail suscitait un échange de savoir faire et de connaissances.

Nous avons choisi de présenter ici deux objets conditionnés par deux groupes différents, pour mettre en lumière les techniques et contraintes selon les matériaux.

 

Le masque à gaz et son étui 

 

Parmi les objets à conditionner se trouvait un masque à gaz français datant de la fin de la Première Guerre Mondiale, ainsi que son étui de rangement. Cet appareil respiratoire à cartouche était dans un état de dégradation très avancé, et il a donc représenté un véritable  défi pour la fabrication du conditionnement. Il fallait lui créer une boîte où seraient rangés le masque et l’étui côte à côte, sans que le masque soit en tension avec la mousse de polyéthylène, pour ne pas l'abîmer lorsqu’il sera mis en réserve.

Le masque en lui-même est constitué de cuir, sec, rigide, et cassant ; de tissu pour les lanières d’attache ; de plastique, jauni par le temps, pour les « lentilles » placées au niveau des yeux ; et d’attaches métalliques, rouillées, pour régler la taille des lanières. Il fallait être très précautionneux lors de la manipulation de l’objet, pour ne pas l’abîmer davantage.

Après avoir observé l’objet sous tous les angles, mesuré chaque partie, et pris de nombreuses photos, nous avons imaginé plusieurs solutions de conditionnement possible, avant de parvenir à une idée qui permettrait de protéger au mieux l’objet tout en étant attentif à sa conservation.

 

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Masque à gaz et son étui © M.P.

 

Nous pensions d’abord suspendre le masque grâce à un crochet au niveau de la cartouche, et laisser la partie « souple » en cuir reposer sur un coussin, mais cela aurait créé des tensions qui auraient dégradé l’objet au fil du temps. La solution choisie devait permettre de laisser reposer le masque, mais sans qu’il s’écrase sous son propre poids. Après quelques croquis et des questions aux régisseurs nous accompagnant, nous avons élaboré une solution avec différentes couches de mousses, qui soutiendraient les différentes parties du masque, pour soulager au mieux les tensions dû à la vieillesse du cuir, qui s’est rétracté sur lui-même au fil du temps.

Nous avons donc décidé de créer un rangement en mousse polyéthylène avec un creux accueillant la cartouche du masque, et une cale permettant au cuir du masque et aux lanières de reposer sans que le poids ne pèse sur l’objet. Pour éviter que le cuir s’affaisse au niveau du visage, nous avons glissé un petit coussin de Tyvek dans le masque, en soutien, ainsi que quelques autres adaptations permettant de conditionner l’objet dans de bonnes conditions. Une vidéo a été réalisé par Coline pour présenter le conditionnement du masque, la voici : https://youtu.be/J6403Id1JPE

 

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Masque à gaz et son étui dans la mousse de polyéthylène © C.D.

 

Nous avons ensuite créé la boîte et son couvercle en polypropylène cannelé qui abriterait le socle de mousse. Après les cutters et les crayons, la perceuse et les rivets !

Et quelques heures de travail plus tard, sans aucune blessure, nous pouvions rendre au Musée de Harnes une boîte transportable, dans laquelle l’objet était en sécurité, et aussi immuable que possible. 

 

Le sabre de carabinier allemand 

 

Un autre des objets à conditionner était un sabre de carabinier allemand. N’ayant pas d’indications sur la datation, nous avons supposé à partir de nos recherches qu’il datait des années 1870. Cela nous a aidé à soumettre des hypothèses, quant à la technique et aux matériaux de fabrication. Le sabre est donc constitué de deux parties, une lame en acier et une monture dont le matériau n’a pas été identifié. La soudure constitue un potentiel point de fragilité, il est alors important que le conditionnement le prenne en compte, sans poids sur un des deux côtés du sabre. Afin de le manipuler correctement, il faut donc penser à placer une main sous la lame et l’autre sur la monture.

Nous avons demandé à Léo, le Fab Manager, de nous montrer le fonctionnement de la découpeuse laser, de façon à ce que la forme de la mousse de polyéthylène suive avec précision la courbe de la lame et de la monture. Deux encoches ont été creusées, pour une meilleure préhension de l’objet s’il doit être sorti de sa boîte de conditionnement. Du tyvek est inséré dans le polyéthylène, là où est posé le sabre. Le contact de la mousse risquerait de détériorer le sabre, déjà en proie à des oxydations. La boite est entièrement faite à partir de plaques de polypropylène cannelé.

 

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Le sabre est dans la boîte ! © C.C.

 

Avec les factures fournies, nous avons calculé de manière approximative le coût du conditionnement. Pour ce sabre, il monte à quasiment 40 euros. On se rend compte alors que la conservation préventive peut rapidement être coûteuse, notamment pour des structures comme des musées associatifs.

Le Workshop Régie s’est avéré une véritable opportunité pour réfléchir sur les objets et problématiser les enjeux de leur conservation. La prise en main réelle des objets de collection et des matériaux de régie fût très formatrice. Les conditions de travail étant exceptionnelles, elles ne représentaient pas à l’identique celles que l’on retrouve dans un cadre professionnel. Mais c’est avec satisfaction et fierté que nous avons tou.te.s. présenté nos travaux !

 

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Quelques boîtes de conditionnement faîtes avec soin ! © M.P.

 

Cécile C. et Maud P.

 

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