Un musée “pour” enfants ou un musée “des” enfants ? Qu’on s’entende bien, je ne suis pas du tout une fine connaisseuse en musée à destination des “mômes”, bambins, adultes en devenir... Mais j’ai eu, comme beaucoup, une expérience des musées quand j’étais enfant ! Ayant eu la chance de passer mon enfance en Californie, mon musée préféré était le San Diego’s Children’s Museum !
Un musée qui nous appartient.
Ce musée est assez particulier, j’aime dire que c’est un musée “des” enfants, et non pas un musée “pour” enfants. Il nous appartenait. Un musée où nous étions libres de nous exprimer, d’interpréter, de découvrir et de contempler les choses à notre échelle et comme bon nous semblait. Un musée qui invite des artistes à créer des œuvres pour les enfants. Un musée qui fabrique des espaces scénographiques à l’intention des enfants pour leur permettre d'apprendre de manière informelle. Un musée où les panneaux “ne pas toucher” sont proscrits et où stimulation et expérimentation sont les maîtres-mots.
“Ne pas toucher”
Mais lorsque je suis arrivée en France, les musées me paraissaient bien fades. Cette fois-ci, ils appartenaient aux adultes. Je ne me sentais plus libre de mes mouvements et pensées. J’avais la sensation d’entrer dans un sanctuaire immuable, où rien ne m’était autorisé, à part écouter, regarder et surtout ne pas faire de bruit. Quand on cherche en France des musées dédiés aux enfants, ce sont principalement sur des Muséums d’Histoire Naturelle et des centres de cultures scientifiques et techniques. Le forum des Sciences à Villeneuve-d'Ascq a son espace dédié aux plus petits avec le petit forum par exemple ou encore le Quai des Savoir de Toulouse avec le Quai des petits. Ce sont des espaces où des sujets scientifiques sont déclinés et traités pour être abordés avec des 2-7 ans. La communication scientifique est-elle la seule à s'intéresser aux jeunes publics ? Vous me direz que l’apprentissage des sciences peut être plus ludique ; il n’y a qu’à voir la Cité des Sciences qui propose ces interactivités. Aujourd’hui encore, j’y retrouve mon âme d’enfant. Mais croyez-moi, jamais la gamine curieuse que j’étais n’a retrouvé l’engouement que j’ai pu ressentir au Children’s Museum qui pourtant propose de découvrir l’art contemporain !
Aujourd’hui, j’entre dans les musées d’art pour admirer, contempler et m’émerveiller, sans pour autant me focaliser sur l’apprentissage de l’histoire de l’art ou autre connaissance. J’apprécie la médiation, qui est faite autour des œuvres que j’observe, lorsqu’elle y est présente, mais généralement je ressors en me disant seulement : “j’ai vu de belles œuvres". Ce ressenti et cette sensibilité pour l’art pourrait être transmise aux enfants. Par exemple, au Children’s Museum de San Diego, dans la maison de la pluie, une cabane sensorielle, l’enfant peut entendre l’eau tomber sur le toit et ses sens s’éveillent.
Je ressens toujours que l’apprentissage est scolaire ou élitiste dans les musées français : Regarde, écoute, sois attentif mais ne touche surtout pas ! Tout cela me parait un peu “rabat-joie”. Le Musée en Herbe, encore à Paris, est une belle initiative, mais il reste conçu comme un musée d’art. Des œuvres sont accrochées aux murs, certes plus bas, mais toujours avec une délimitation et une sacralisation des pièces. Ce type de musée me semble important pour comprendre les codes de l’art, mais, est-ce le monde des adultes qui doit être ramené à l’échelle des enfants ou alors le monde des enfants qui doit être “mis en musée” pour eux ? Certes il est important d’observer, mais il me semble qu’on apprend mieux et qu’on retient mieux en vivant, en expérimentant, bref, dans le “faire” et ce d’autant plus chez l’enfant.
Du jeu et de l'immersion
Par ailleurs, la devise du San Diego Children’s Museum est « think, play, create » (cad. « pense, joue, crée »). L’importance du jeu et de l’épanouissement de l’enfant sont la clé dans les pays anglo-saxons. Mais comment ne pas tomber dans la création d’un parc d'attractions ? En fait, c’est l’exposition d’œuvres artistiques qui incitent autant à la contemplation qu’à l’amusement. L’accent est mis sur l'immersion et sur le ressenti. Les expositions immersives sont une tendance actuelle dans les musées à cible familiale, cependant, avec une touche plus “instagrammable” que participatives. L'accent est mis sur la qualité photographique et partageable à travers les réseaux sociaux. (ex. L’atelier des lumières…)
Je suis très intéressée par les systèmes d’éducation type Montessori qui remettent en question l’éducation descendante et compétitive, l’éducation classique. Certes, cette dernière qui prévaut, a fait ses preuves, mais dans un monde à son image. Il serait peut-être temps de privilégier de réelles alternatives éducatives pour faire émerger la créativité des enfants, favoriser leur imagination et le partage des connaissances et du patrimoine.
Le Children’s Museum de San Diego a été rénové en 2008 pour laisser place au New Children’s Museum. Le mot "nouveau" signifiant que le musée s'est concentré sur la commande d'artistes contemporains pour créer des installations artistiques à grande échelle pour que les enfants puissent s'y intéresser et les explorer. Leur modèle de musée pour enfants a pour mission de stimuler l'imagination, la créativité et l'esprit critique des enfants et des familles par le biais d'expériences inventives et engageantes autour de l'art contemporain.
Il existe plusieurs musées des enfants pour découvrir l’art aux États-Unis (le premier datant de 1899 à Brooklyn), à Bruxelles (création en 1978) et d'autres dans le monde. À quand un musée des enfants en France ?