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Au cœur du Vieux Lyon et du secteur Unesco, l’hôtel de Gadagne accueille le musée d’histoire de Lyon depuis aujourd’hui 100 ans, ainsi qu’un musée à part entière, le Musée des Arts de la Marionnette. Ce musée, auparavant nommé le musée international de la marionnette puis le musée des marionnettes du monde, a intégré le musée d’histoire dès 1950, et fut agrandi en 2009. Unique musée de ce type en France, c’est naturellement à Lyon, lieu de naissance de Guignol, qu’il prend place à la suite d’une décision amenée par George Henri Rivière d’effectuer un important dépôt du Musée National des Arts et Traditions Populaires.
Vue d’une salle du musée jusqu’en 2009 / Terry O’Neill - Musée des Arts de la Marionnette - Gadagne
En changeant de direction en 2015, le Musée d’Histoire de Lyon (MHL) et le Musée des Arts de la Marionnette (MAM) entament une nouvelle refonte, en accord avec leur nature de musées de société, en s’ancrant toujours plus dans leur territoire et leur époque. Du côté du MHL, l’ancienne muséographie du parcours permanent laisse place à quatre nouvelles expositions, inaugurées l’une après l’autre, sur un rythme annuel. Après une première ouverture en 2019 de l’exposition Portraits de Lyon, servant d’introduction au musée mais aussi à la vie lyonnaise, le MHL propose depuis mai 2021 le deuxième volet de cette refonte, Les pieds dans l’eau.
Vue de l’exposition Les pieds dans l’eau ouverte en mai 2021 / Jade Garcin
Des changements chez les marionnettes
Les marionnettes aussi ont droit à une nouvelle jeunesse. Repensé afin de présenter à la fois les origines de la marionnette et la création contemporaine, le MAM devient un modèle d’intégration des contraintes de l’exposition d’un art vivant, ce qui tient d’ une de ses spécificités : sa nature d’exposition semi-permanente… ou évolutive, disons en rotation.. ou peut-être de référence ?
Un problème de définition
Si ce projet était bel et bien présenté comme une exposition “semi-permanente” dans les premières années, les enjeux concentrés dans cette dénomination ne correspondaient pas à ceux réellement présents. Lorsque l’on parle de semi-permanent, on pense à une exposition temporaire durant plus longtemps que la normale, comme la Galerie de la Méditerranée au Mucem, présentée durant 3 ans avant de changer, ou celle du musée ethnographique de Neuchâtel conçue en assemblant différentes expositions régulièrement renouvelées, et unifiées graphiquement.
En évoluant tous les 4 ans, le Musée des Arts de la Marionnette pourrait-il être une exposition évolutive ? Si l’on considère le paysage expographique actuel, cette dénomination semble consacrée à une typologie d’expositions relevant de la production artistique, régulièrement construite avec participation des visiteur·euse·s, en tant qu'œuvre en elle-même. Ce qui ne correspond pas au cas du MAM.
Parler de la “rotation” d’une exposition donnerait à penser que les enjeux derrière seraient purement en terme de conservation préventive des collections, et il serait inexact de penser que cela ne relève que de ça.
Faire référence !
Peut-on alors parler d’“exposition de référence” ? L’on retrouve ce terme non loin de Gadagne, au bout de la presqu’île lyonnaise. Pour Michel Coté, ancien directeur du musée des Confluences, il n’était plus question dans ce cas de parler d’expositions permanentes ou temporaires, mais respectivement d’expositions “de synthèse et de référence” et d’expositions “de déclinaison”. Selon lui ”L’exposition doit faire autorité au sens où ce qu’elle explique doit être rigoureusement fondé sans exclure pour autant la présentation de points de vue différents".
Le Musée des Arts de la Marionnette version 2017/2018 prend le parti de montrer la création marionnettique contemporaine, et de répondre à ses grandes questions structurantes par des exemples de techniques, de compagnies, ou encore de spectacles variés et diversifiés. En multipliant les réponses, les points de vue, ce musée se place alors en tant que référence dans la présentation de compagnies contemporaines et des sujets qui les animent.
Première salle du MAM depuis 2017 / Xavier Scwhebel - Musée des Arts de la Marionnette - Gadagne
Cap sur 2022
En décidant de faire évoluer le parcours tous les 4 ans, le musée se prête à un exercice de réactualisation de son contenu, en exposant de nouvelles pièces de sa collection mais surtout de nouvelles compagnies et des spectacles récemment créés. Il élargit le panorama des techniques, des pays, des thématiques… et complète, cycle après cycle, le le paysage marionnettique contemporain international. Cela apporte aussi un regard neuf sur le parcours muséographique et devrait - cela est souhaité - avoir le même effet sur la fréquentation des publics que l’ouverture d’une exposition temporaire classique.
Quelles spécificités ?
Mettre en place un projet tel que celui-ci engendre cependant des problématiques propres sur différents aspects. La scénographie, la régie, la sphère administrative et bien entendu la muséographie font partie des éléments qui doivent être pensés de manière spécifique à l’exercice.
La muséographie
La réflexion autour du discours sur les objets est un des points clefs de cette forme expographique. Le parcours a été pensé comme une base à réagencer, repenser, reformuler… Il s’appuie sur des questions fortes, autour desquelles s’articulent d’innombrables déclinaisons possibles de réponses. En mêlant collections du musée et dépôts de compagnie et d’institutions, le parcours s’ouvre là encore à de nombreux possibles.
Une des grandes questions structurantes, et vitrine sur “le rire contre l’opression” / Xavier Scwhebel - Musée des Arts de la Marionnette - Gadagne
La scénographie et l’agencement
Renouveler les objets exposés est synonyme de nouveaux soclages, de mouvements dans les salles, de réécriture des textes, mais pas nécessairement de budget permettant de reprendre entièrement l’agencement tous les 4 ans. Ainsi, des astuces scénographiques ont été trouvées pour pallier ces contraintes. On trouve alors au musée des grilles perforées au fond de la plupart des vitrines, sur lesquelles peuvent venir se placer à l’endroit souhaité tous les soclages, réalisés en interne. On peut aussi, sur ces mêmes grilles, placer et replacer les cartels imprimés sur un support aimanté et donc repositionnables à l’infini sans laisser de trace.
Cartel magnétique et panneau perforé / Jade Garcin
Une question d’organisation
D’un côté pratique, la régie ou encore l’aspect administratif doivent aussi s’adapter à ce format et cette temporalité particuliers. Si certains des objets exposés appartiennent à Gadagne, d’autres sont empruntés à des compagnies pour une durée minimum de quatre années et demi. Cela implique alors un fonctionnement par dépôts, renouvelables, sur cette période. Le lien avec les spectacles vivants se perçoit ici également, car si certaines marionnettes ont arrêté leur tournée, d’autres retrouvent encore ponctuellement leur public, et quittent alors le musée pour une courte durée.
Le renouveau des possibles
Outre son parcours principal, cette exposition propose un espace dit “la salle carte blanche”, prêté à un artiste pour une période de 2 à 3 ans. C’est alors un nouveau lieu pour se renouveler et laisser place à un autre regard. Actuellement, Renaud Herbin y présente son travail à la croisée de la marionnette et de la danse, en laissant une grande part à la matière. Présentée comme une salle à part entière, elle s’intègre en réalité dans le parcours, spatialement, mais aussi en participant à rendre chaque visite unique.
Pour aller plus loin :
#rotation #marionnettes #Gadagne