Analyse de la relation entre une architecture muséale et son environnement proche : le Centre Botin à Santander réalisé par Renzo Piano, est pensé comme levier de développement de son territoire.
Le Centre Botin est un centre d’art de référence à Santander, en Espagne, inspiré par l’impact du Guggenheim de Frank Gehry sur le développement de Bilbao qui se situe à une centaine de kilomètres de Santander. Le Centre Botin est inauguré en 2017 par l’architecte Renzo Piano, architecte du Centre Pompidou à Paris et de Luis Vidal. Il est conçu comme un nouveau point de repère sur le front de mer, un lieu vivant, de rencontres, partages, loisirs, découvertes et réflexions.
© Suzon Auber
L’architecture du musée
Le projet est composé de deux volumes reliés entre eux par des places et des passerelles. Chaque volume est ouvert d’un côté vers la mer, de l’autre vers la ville et les jardins de la Pereda. C’est un bâtiment léger presque flottant en porte-à-faux au-dessus de la mer. L’utilisation de piliers et de colonnes à hauteur de la cime des arbres environnants libère l’espace public au rez-de-chaussée et laisse passer la lumière. Renzo Piano utilise très souvent du métal, de grandes baies vitrées et des structures apparentes : escaliers, terrasses, passerelles. Comme un phare sur la côte, le musée est un point de repère s’intégrant parfaitement à son environnement.
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Intégration du musée dans son contexte
L’intégration d’un musée dans la ville par l’aménagement urbain est primordiale et à ne pas négliger. Ici, l’espace public est valorisé avec un chemin piétonnier sur le front de mer. Les espaces entièrement vitrés au rez-de-chaussée prolongent l’espace public jusqu’à l’intérieur du musée. Ce jeu de transparences crée de nombreuses percées visuelles libérant la frontière entre le musée et l’espace public. A l’est, au rez-de-chaussée se situent l’accueil, la boutique et un lieu de restauration. A l’ouest, un amphithéâtre extérieur permet de faire sur la place publique un cinéma et des concerts en plein air.
Le bâtiment surélevé permet de créer un espace couvert de 950m2, un lieu de rencontres entre les habitants. Ensuite, de nombreuses passerelles et places sont accessibles à tous les niveaux, elles surplombent la mer et nous offrent un autre regard sur le musée et son environnement. Le musée devient un outil de développement de son territoire, bien plus qu’une simple enveloppe qui présente des collections. Le musée dynamise la vie de la ville et enrichit le tissu social et culturel.
Par son architecture, le musée devient œuvre à son tour, sans pour autant interférer négativement avec les œuvres en son sein. Au contraire, le musée permet aux œuvres de raconter une autre histoire et de dialoguer avec le lieu.
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Quelle relation entre les œuvres et le bâtiment ?
A l’est, le bâtiment comporte un auditorium, des espaces pour des activités éducatives et sur le toit une terrasse donnant sur la baie de Santander. A l’ouest le bâtiment est consacré aux expositions sur deux niveaux pour une surface d’environ 2500m2.
Le souvenir d’une exposition peut être marqué par son cadre, ses vues, ses perspectives, et bien sûr par la cohérence de l’exposition dans le lieu choisi. Ce sont des enjeux de l’architecture muséale : comment créer un équilibre entre l’architecture et les œuvres exposées et comment favoriser la rencontre de l’œuvre avec l’Homme ?
La Fondation Botin possède une collection d’art depuis 1993, centrée sur l’art contemporain, elle comprend des œuvres de diverses disciplines : peinture, sculpture, dessin, photographie, vidéo et installation… L’exposition permanente est renouvelée chaque année tandis que les expositions temporaires durent de six à sept mois.
Les espaces d’exposition du Centre Botin entretiennent une relation directe avec les œuvres. Par exemple, le Centre Botin a accueilli des œuvres de Alexander Calder scénographiées par Renzo Piano. Les œuvres entretiennent un dialogue direct avec le musée, le bâtiment comme les œuvres de Calder étaient comme un mobile flottant au-dessus du sol.
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Les thématiques abordées par le musée sont directement en lien avec le Centre Botin et son architecture authentique considérée comme œuvre d’art. « Arte y architecture: un diálogo » examine le rapport de l’artiste à l’architecture. L’exposition explore les influences réciproques que l’art et l’architecture peuvent avoir les uns sur les autres, que ce soit d’un point de vue conceptuel ou formel. L’histoire de l’art et celle de l’architecture sont intrinsèquement liées. Au fil du temps, artistes et architectes ont collaboré. Le musée, un espace public dont la première fonction est de collecter et conserver l’art, modifié la dynamique de cette relation. En effet, si le bâtiment devient le dépositaire de l’œuvre d’art, la question de son importance en tant que contexte devient plus saillant.
Une autre question peut émerger : comment l’architecture peut-elle affecter l’œuvre de l’artiste ? L’artiste Sol Lewitt a considéré dans ce musée, l’espace d’exposition comme partie intégrante de son travail. Ainsi, sa peinture Wall drawing 499 directement sur le mur de l’exposition, enlève toute sorte de frontière en l’œuvre et l’architecture, sans toiles, ni cadre.
L’effet Bilbao a-t-il fonctionné pour le Centre Botin ?
En 2019, le bâtiment, ses places et ses espaces extérieurs ont attiré plus d'un million de visites, dont 186 606 visiteurs au musée, en provenance de 95 pays, 145 256 visiteurs se rendaient aux expositions et 41 350 personnes ont participé aux activités culturelles et éducatives. Les expositions ont attiré 68 000 habitants de la région de Cantabria : ces chiffres montrent que le Centro Botín est un lieu vivant et pleinement intégré dans la ville. Le musée remplit sa mission de développement de son territoire, générant de la richesse économique et sociale à Santander, cela confirme la réussite de l’effet Bilbao pour le Centre Botin.
Suzon Auber
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