Du 20 octobre 2024 au 25 août 2025, l'exposition "Sauvage ?" vous invite à explorer la frontière délicate entre animalité et humanité. Le concept de sauvage, une invention purement humaine, est revisité pour interroger la place que nous occupons au sein de cette nature que nous percevons souvent comme lointaine et inaccessible. Serions-nous tous sauvages ?

Une exposition adaptée pour son volet belge

Cette exposition remet en question le concept de la faune et de la flore “sauvage” et la relation que nous entretenons avec elle en tant qu'êtres humains. Elle incite les visiteurs à réfléchir, conteste la hiérarchie humaine sur les autres êtres vivants, et attire l'attention sur les menaces pesant sur la biodiversité. Conçue par le Musée d’histoire naturelle de Neuchâtel (MHNN) en Suisse, avec une approche décalée et engagée propre au MHNN, cette exposition est reçue en itinérance par l’Institut des sciences Naturelles de Belgique (IRSNB) pour un an et a été partiellement adaptée.

La principale adaptation de l'exposition consiste en un remaniement axé exclusivement sur la faune belge, intégrant uniquement des animaux naturalisés des collections de l’IRSNB. Des adaptations scénographiques internes ont été réalisées pour ajuster l'exposition aux espaces de l’Institut et pour proposer une présentation en quatre langues (NL, FR, DE, EN). Outre les ajustements spatiaux, la muséographie et le discours ont également été modifiés, notamment avec le changement de concept des zones 3 et 7 que nous abordons par la suite.

Chaque zone de l’exposition à Bruxelles reprend les relations que l’humain entretient avec le sauvage :

1. Avoir peur, être fasciné
2. Capter, posséder
3. Domestiquer, dominer
4. Se placer en dehors, se sentir supérieur
5. Étudier, classer
6. Menacer
7. Cohabiter, protéger

Déconstruction du concept de sauvage

 

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Zone 1 : La voix des bêtes © CP
Zone 2 : L’envers du décor © CP

 

L’humain, un animal parmi les animaux. Grâce à notre éducation et notre culture, nous nous sommes soigneusement placés en dehors du règne animal en inventant le mot "nature". Pourtant, dans certaines sociétés d’Australie, d’Amérique du Nord et du Sud et où ce mot n'existe pas, les gens vivent sans cette distinction et semblent s'en sortir sans encombre. Cette exposition brise notre autocratie humaine et remet en question nos schémas de pensée autocentrés. Car la « culture » n’est pas le propre de l’humain. Une série de vidéos thématiques nous montrent que les autres animaux sont aussi capables d’avoir des comportements complexes : faire de l’élevage, de l’agriculture, s’amuser, prendre du plaisir, se soigner, faire le deuil...

 

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 Vues de la zone 4 : Sauvage y es-tu ? © CP

 

La zone 3, initialement intitulée “Être vivant” à Neuchâtel et dédiée à l’origine et à l’état actuel de la vie, a été transformée à Bruxelles pour mettre plus en avant le concept de domestication et de domination par l’humain. Ah, nos animaux de compagnie ! On ne les considère pas comme sauvages, mais ils conservent des comportements naturels hérités de leurs ancêtres. Peut-être avons-nous domestiqué non seulement les autres animaux, mais aussi nous-mêmes. L'auto-domestication n'est pas une théorie largement acceptée, mais notre apparence, notre comportement et nos gènes pourraient bien pointer dans cette direction. Alors, qui sait, peut-être que nous ne sommes pas si différents de nos fidèles compagnons à quatre pattes !

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 Vues de la zone 3 © CP

Focus sur la Belgique

Exclusivement consacrée aux animaux belges issus des collections de l’Institut, cette exposition met en lumière la faune locale. L’affiche a d’ailleurs mis à l’honneur le renard roux, en clin d’œil à ces nombreux renards urbains de plus en plus présents dans les jardins de Bruxelles.

L’exposition vise à faire découvrir aux visiteurs la richesse de la faune environnante, souvent réduite dans l'imaginaire collectif aux sangliers, castors et renards en forêts. Pourtant, cette faune réserve des surprises : saviez-vous que des ours bruns ont autrefois vécu en Belgique ? Qu’une tortue marine caouanne s’est échouée sur les plages de la mer du Nord ? Ou bien que des meutes de loups se sont récemment installés dans les forêts de Belgique ?

La zone 5, "Sauvage en boîte", met en avant la diversité de la faune belge et revient sur l'histoire des collections de l’Institut des Sciences naturelles. Un aspect particulièrement intéressant de l'exposition est l'histoire racontée sur chaque spécimen exposé. Lorsque connue, l’origine de chaque animal est relatée sur son cartel. Cette transparence sur la provenance permet aux visiteurs de prendre conscience de la diversité des sources : saisis par la douane, victimes d'accidents de la route, morts de vieillesse au zoo d'Anvers, collectés dans le cadre de recherches scientifiques...etc. Cela donne du sens à chaque spécimen, offrant une seconde vie et permettant d'en apprendre davantage sur leur parcours.

Pour rappeler avec humour que l’humain, tout comme le reste du règne animal, a été beaucoup étudié, le visiteur peut lui aussi se glisser dans une « boîte » sous le cartel d’Homo sapiens.

 

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Vues de la zone 5 : Sauvage en boîte © CP

Qui est le plus sauvage ?

Surexploitation, destruction des habitats, espèces invasives, changement climatique et pollution sont toutes des menaces d'origine humaine qui pèsent lourdement sur la biodiversité. La Zone 6 de l’exposition engage le visiteur dans une réflexion sur la responsabilité humaine face à cette crise. Qui est réellement le plus sauvage : les animaux dits "sauvages" ou l'Homo sapiens qui menace leur existence ? Cette question sous-tend toute la zone, incitant le public à se confronter aux conséquences de ses propres actions.

Le dispositif muséographique repose sur cinq compteurs en temps réel et réactualisés tous les matins. Chacun symbolisant une menace directe liée aux activités humaines. Par exemple, un compteur défile, affichant en temps réel le nombre de kilos de plastiques déversés dans nos océans depuis 10h ce matin. Ces chiffres, qui ne cessent de grimper, sont un rappel brutal de l’impact humain. Les visiteurs ne peuvent rester indifférents face à cette matérialisation des menaces.

L'installation frappe par son approche immersive, teintée d'une inquiétante couleur rouge, évoquant des signaux d'alarme. Elle met en lumière la disproportion entre la lenteur de la nature à se régénérer et la rapidité avec laquelle l’être humain la détruit. L'humain pourrait-il un jour devenir aussi menacé qu'il est menaçant ?

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Vue de la zone 6 : Sauve qui peut ! © CP

Cohabiter

La dernière salle "Nature chérie" a complètement été revue car elle n’avait pas très bien fonctionné à Neuchâtel. Cependant, son approche introspective reste inchangée. Dans la continuité de la zone 6, cette dernière salle cherche à pousser l’introspection plus loin autour de ces réflexions : Quelle est ma place dans ce monde vivant ? Que suis-je prêt à faire pour respecter les autres êtres vivants ?

L’installation muséographique utilise deux dispositifs pour renforcer cette connexion. Tout d'abord, des caméras animalières placées dans différents environnements en Belgique (forêts, villes, jardins publics et privés) capturent des scènes de vie sauvage, projetées sur deux écrans géants.

En s’immergeant dans ces images non éditées, le visiteur peut, s'il prend le temps, découvrir la nature telle qu'elle est. Pas besoin de parcourir des kilomètres pour l’observer, la nature sauvage se situe sous nos yeux, il suffit de bien regarder...

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Vue de la zone 7 : Nature chérie © CP

 

Le second dispositif invite le visiteur à l'empathie à travers des téléphones fixés aux murs. Lorsqu'on décroche, des messages vocaux d'animaux en détresse se font entendre via une messagerie intitulée "SOS Nature", imitant un service téléphonique d'urgence. Ces animaux humanisés par des voix de comédiens demandent de l’aide face aux accidents de la vie quotidienne. Ils partagent leurs difficultés pour survivre qui nous rappelle que leur survie dépend directement de nos actions. Le visiteur y entend des oiseaux paniqués par la destruction de leur nid, des hérissons se noyant dans une piscine, ou encore des canards souffrant d'avoir ingéré trop de pain. Ce dispositif incite à un engagement personnel des visiteurs pour protéger les espèces qui les entourent.
Le visiteur sera-t-il prêt à s’investir pour écouter et voir cette nature en détresse ?

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Dispositif SOS Nature © CP

La fin de l'exposition cherche à toucher les visiteurs au cœur, les invitant à rétablir un lien essentiel avec le monde vivant qui les entoure. Cette expérience immersive, à la fois visuelle et émotionnelle, vise à éveiller une curiosité durable et une envie d’agir pour la biodiversité.

Tous sauvages !

Camille Paris

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#Belgique

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