En pleine mutation numérique, le spectacle vivant trouve une nouvelle voie pour toucher un public plus large grâce à des initiatives innovantes. Parmi celles-ci, L’éloge, un média culturel fondé en 2020 par Constance Arnoult et Anaëlle Malka, démontre que les plateformes digitales comme Instagram peuvent être des outils puissants pour promouvoir les arts de la scène.

Une initiative née durant le confinement

L’idée de créer L’éloge a germé pendant le confinement de 2020, une période propice à l’exploration de nouveaux formats. Constance Arnoult, danseuse passionnée et ancienne élève du Conservatoire de Tours, a commencé par partager des recommandations littéraires sur Instagram. Le format des « Claques littéraires » court, rythmé et frais, fonctionne. Face à l’enthousiasme suscité par ses vidéos, elle s’associe avec son amie Anaëlle Malka pour créer un compte Instagram relayant leurs coups de cœur culturels : littérature, cinéma, danse. Leur objectif ? Dépoussiérer l’image parfois élitiste des arts de la scène et les rendre accessibles à un public jeune.

CHEREL 2025 LELOGE IMG1Constance Arnoult et Anaëlle Malka devant le Théâtre du Châtelet © India Lange


Quatre ans après, l’on peut dire que le succès est au rendez-vous : avec près de 40 000 followers sur Instagram, L’éloge fait office de figure de proue dans son domaine. L’équipe rédaction s’est agrandie avec Dobra Szwinkel et Emma Lavenka pour continuer à produire du contenu toujours plus qualitatif. Le média est relayé et reconnu : Vanity Fair leur accorde un article à l’occasion de la cérémonie Les Éloges. La liste des partenariats s’allonge et l’on fait confiance au média : l’équipe est régulièrement invitée à venir en coulisses de divers spectacles comme en octobre dernier où le média était invité à filmer les behind the scene des répétitions du gala d’ouverture du Palais Garnier. Les maisons Guerlain et Cartier sont fréquemment partenaires d’événements réalisés par L’éloge.

Une diversité de contenus

Aujourd’hui, L’éloge propose une vaste gamme de contenus : des interviews et chroniques sur le théâtre, le ballet et l’opéra, mais aussi des guides sur les expositions et sorties cinématographiques. Le principe des « Claques littéraires » est poursuivi et s’étend à d’autres domaines : les cabarets, les comédies musicales, etc. Le média relaie l’actualité du spectacle vivant en France, à Paris principalement, et plus rarement à l’échelle internationale. Ainsi, des guides concernant l’actualité des sorties des 7 arts sont publiés par saisons avec un bref décryptage du synopsis des spectacles en question et des informations pratiques.

CHEREL 2025 LELOGE IMG2Publication Instagram « Le guide, coups de cœur du off Avignon » © Maria Clauzade


L’éloge met en avant des nominations et attributions de rôle comme celle de Roxanne Stojanov en tant que danseuse étoile de l’Opéra de Paris ou encore Angelina Jolie dans le biopic de Maria Callas en tant qu’interprète de la célèbre cantatrice. Les posts sont des rencontres filmées avec des acteurs du spectacle vivant dans les coulisses de leur travail pour échanger sur leur métier ou évoquer leurs propres recommandations culturelles à l’instar de l’actrice française Anna Girardot qui s’est prêtée au jeu. Ces vidéos sont généralement un format court d’une à trois minutes maximums, correspondant parfaitement à la plateforme Instagram. Les « Starter Pack », des focus sur des personnalités, viennent compléter le tableau des contenus proposés par L’éloge.

CHEREL 2025 LELOGE IMG3 1Compte Instagram de L’éloge © L’éloge

 

Les posts sont publiés majoritairement sur Instagram et sur YouTube. Quelques rencontres ont été enregistrées en podcast, disponibles sur toutes les plateformes de streaming audios, bien que ce ne soit pas plus approfondi par le média.
L’approche de L’éloge se distingue par sa vision positive : l’équipe de rédaction présente uniquement des spectacles et œuvres qu’elles apprécient. En s’abstenant de toute critique négative, elles ne s’inventent pas critiques d’art et valorisent foncièrement l’essence créative et humaine des arts de la scène.

La Cérémonie Les Éloges : une ode au spectacle vivant

En complément de leur activité en ligne, L’éloge organise depuis 2023 une cérémonie annuelle pour célébrer les arts scéniques avec comme partenaires le Théâtre du Châtelet, Vanity Fair et la French Touch. À l’image des Molières, cérémonie de récompense du théâtre français et des Trophées de la comédie musicale, Les Éloges propose une cérémonie qui récompense tous les acteurs du spectacle vivant, artistes comme artisans. La première édition, tenue au Théâtre du Châtelet en octobre dernier, présente des catégories mettant à l’honneur des chefs d’ateliers perruques, coiffures et maquillage, des chorégraphes, des chefs d’ateliers costumes et designers ou encore scénographes.

CHEREL 2025 LELOGE IMG4Constance Arnoult, Elysée Moon, Dobra Dobra Szwinkel et Emma Lavenka à la cérémonie L’Eloge© India Lange

 

La seconde édition, en 2024, a confirmé le succès de cet événement. Avec la drag-queen Elysée Moon comme maîtresse de Cérémonie, le metteur en scène Vincent Huguet en parrain de cette édition, les Éloges a récompensé des figures emblématiques telles que Marina Hands, comédienne et metteuse en scène, qui a reçu l'Éloge d’Honneur. La Claque, prix donné par les fondatrices de L’éloge, a été attribué au spectacle L’Art de la Joie d’après Goliarda Sapienza, pièce mise en scène par Ambre Kahan. Enfin, l'Éloge du Public est revenu à Mais quelle Comédie ! spectacle musical conçu et mis en scène par Serge Bagdassarian et Marina Hands joué à la Comédie Française.

CHEREL 2025 LELOGE IMG5Marina Hands, Eloge d’Honneur 2024 © Jean-Louis Fernandez

 

Cette soirée festive, placée sous le thème des arts forains, a été émaillée de performances artistiques vibrantes : d’un défilé Repetto par la compagnie Gam en passant par une performance de cirque de la compagnie Le Roux. La cérémonie Les Éloges réaffirme le rôle essentiel des arts de la scène dans notre société.

Mais une définition du spectacle vivant qui a ses limites

Malgré les nombreuses qualités de L’éloge, un élément clef semble manquer à leur initiative : la représentativité de la diversité du spectacle vivant. En se concentrant exclusivement sur les formes traditionnelles scéniques telles que le théâtre, l’opéra, le ballet et le cinéma, les expressions artistiques non-conventionnelles et contemporaines sont délaissées comme les arts de la rue, la scène drag ou humoristique. La subjectivité du média atteint là sa limite : en cantonnant le spectacle vivant uniquement aux arts scéniques, L’éloge réduit la visibilité de ce dernier. Bien qu’il y ait une ouverture dans les thématiques abordées avec des contenus portant sur les cabarets ou encore les arts de la marionnette, le choix des contenus mis en avant reste essentiellement traditionnel et à destination d’une certaine catégorie sociale. Ce parti-pris, bien que défendable, peut sembler réducteur voire même trompeur, car il ne reflète pas la richesse et la pluralité du spectacle vivant dans sa globalité, ni la volonté revendiquée par le média de rendre la culture plus accessible. Intégrer ces formes alternatives d’expressions artistiques enrichirait leur démarche de manière plus inclusive et représentative des réalités actuelles des arts de la scène. À quand une Claque Humoristique à propos du spectacle Attends-moi j’arrive ! d’Emma Bojan ou encore une Claque Circassienne sur Le Souffle de Mellia de la compagnie équestre L’Art est Cabré ? Le média aurait tout à gagner – public et enrichissement - à ouvrir leurs thématiques, sans pour autant diminuer la qualité de leur contenu. De plus, on note également que les recommandations culturelles faites par L’éloge sont en grande majorité concentrées autour de Paris. À nouveau, on observe une volonté d’ouvrir le sujet en s’intéressant aux grandes villes de France comme le montre la rencontre avec la danseuse étoile Mathilde Froustey à l’occasion du ballet Casse-Noisette à l’Opéra de Bordeaux ou encore la mise en avant du Festival d’Avignon. Cependant, ces initiatives restent minoritaires en comparaison avec le tropisme parisien de leur contenu. Les partenaires auxquels s’associe L’éloge peuvent aussi être interrogés. Pourquoi ne pas les diversifier en mettant en lumière des structures de la culture plus petites qui auraient besoin de plus de visibilité ? Peut-être une marge d’évolution pour L’éloge dans les années à venir ? Affaire à suivre.

Un avenir fait de projets nombreux

À sa manière, L’éloge incarne une nouvelle façon de mettre en avant les arts du spectacle vivant dans une société où les réseaux sociaux sont les premiers moyens de communication. Le travail de L’éloge rappelle que le spectacle vivant, loin de s’éteindre face aux technologies, peut s’enrichir et toucher un large public.
Constance Arnoult dans un interview donné à la French Touch, évoque des projets futurs allant de collaborations internationales, à la création d’un festival en passant par le rachat d’un théâtre. L’avenir de L’éloge s’annonce à son image : brillant.

Louise Cherel

 

Pour aller plus loin :
Compte Instagram de L’éloge : @l_eloge_
Compte Instagram Prix du spectacle vivant Les Éloges : @les_eloges
Article Vanity Fair sur la cérémonie Les Éloges : https://www.vanityfair.fr/galerie/les-eloges-une-ceremonie-hors-des-clous-pour-celebrer-le-spectacle-vivant-dans-ce-quil-a-de-plus-vibrant


#spectaclevivant #lEloge #media

Retour